Oh la vache ! Donc, cette partie d'"Au service de la France" était basée sur des faits réels ?

Cette partie de l'histoire française (la toute fin des années 50 et début des 60's) réussit l'exploit d'être à la fois passionnante et mise sous silence : guerre d'Algérie (et d'Indochine même si un chouïa plus tôt), multiples putschs et tentatives de (oui, la Ve République, c'est la suite d'un putsch militaire réussi), assassinats politiques, de nombreuses manifestations réprimées par de nombreux morts (et inversement et en corollaire, des attaques directes de policiers), ... Ça ne fait qu'une petite dizaine d'années qu'on commence enfin à en parler.

J'aurais tendance à dire qu'il faut du temps à un peuple pour digérer une partie compliquée de son histoire, ici 2 générations.
C'est un fils de pied noir que te dit ça

Idem. Par contre, les vieux commencent à parler. J'arrive de plus en plus à saisir la complexité de l'histoire familiale, quand il y a vingt-trente ans, c'était assez monolithique et commun à tout le monde comme récit.

Moi j'ai plus de vieux pour me raconter malheureusement.
Mais ça donne vraiment l'impression qu'il faut au moins 1 voir 2 génération pour pouvoir parler / digérer une époque.

Là où je dis que c'est complexe, c'est que dans une même famille, pas immense (une fratrie de 4 et leurs conjoints dans leur vingtaine/trentaine), je perçois beaucoup de différences à cette époque (et possiblement liées à de (petites) différences de classes sociales, mais là c'est peut-être mon logiciel qui veut voir ça) :

Mon grand-père et sa famille immédiate vivaient à la ferme, en pleine campagne, au milieu des "indigènes" (oui, c'était le terme employé), mais il n'y avait pas vraiment de différences entre eux, ils vivaient ensemble. Les ouvriers se sont d'ailleurs mobilisés pour arrêter un commando fellaga qui venait les tuer, et politiquement, ils ont été (sans en avoir été informé immédiatement d'ailleurs) protégés, avec le caïd local décidant "ceux-là, vous les tuez pas". Le grand-père, cet imbécile, est d'ailleurs resté seul là-bas après l'indépendance pour "rentrer la récolte", avant de rentrer en métropole. Je l'ai peu connu, mais il est rentré brisé. On me dit qu'il était très joyeux avant, mais ne sourira plus après l'exode.

À l'inverse, tu as une des tantes qui s'est pris une balle lors d'une manifestation, probablement à Alger (pas sûr). J'ai pas les détails précis, mais si je relie les points sur ce que je sais, je miserai volontiers sur un coup de force des partisans de l'Algérie Française, voire de l'OAS, et la balle étant de l'armée ou de la gendarmerie. Dans le même style, un oncle (qui finira notable) a été en prison (française), et s'en est selon la légende familiale enfui (évasion, perm et il est pas rentré ?). J'ai jamais osé poser la question de l'incarcération, mais je m'attends à ce que la cause soit plus politique que crapuleuse.

Et entre les deux, la tante infirmière qui s'occupait des victimes de cette guerre, dans les deux camps, à voir les horreurs perpétrées dans les deux camps.

On est vraiment une génération bénie, à ne plus avoir connu la guerre depuis 60 ans sur notre sol. La guerre, c'est sale. C'est probablement (hop, cross-post) ce qui nous touche collectivement autant sur la guerre en Ukraine, car ceux-ci nous ressemblent, et on voit ce que fait une guerre sur un pays "proche" et connecté, qui diffuse en permanence leur mode de vie changé.